Paris, le vendredi 13 Octobre 2017
Chère Louiza,
J’espère que tu vas bien et que la vie sans moi n’est pas trop dur.
Je voulais te donner de mes nouvelles et te raconter certaines choses ignobles qui me sont arrivé. Cela fait maintenant 8 mois, tout pile, que tu ne m’as pas vu. Je me suis échappé de cette prison le 13 février 2017. La Tchétchénie est un pays où le droit d’être celui que l’on veut être est prohibé. Tu n’es pas sans savoir que depuis quelques temps les militaires et les forces spéciales ont lancé une chasse à l’homme contre nous, les homosexuels. Lorsque ma famille m’a dénoncé, ils m’ont arrêté. Les autorités m’ont jetées dans un fourgon, m’ont bâillonné, attaché les pieds et les mains et m’ont enfilé un sac sur la tête. Je devais être avec plusieurs « Autres », comme ils nous appelaient, car les respirations et les sanglotements étaient nombreux.
L’enfer a commencé lorsque le fourgon s’est arrêté. Les militaires nous tenaient fortement le bras et nous répétaient d’aller plus vite. Plusieurs portes se sont ouvertes, une vingtaine environs. Et je ne te parle même pas des escaliers. Tous plus étroits les uns que les autres. Plusieurs de mes compagnons ont glissé sur le sol en béton, froid et humide. Lorsque nous pensions être à la fin de notre périple, ils nous ont attrapés et nous ont attachés à des chaises, grinçantes et bancales, puis nous ont retiré le sac de notre visage. Leurs visages, je m’en souviendrais toute ma vie. Un sourire narquois, te regardant comme si tu étais un entremets, et cette expression dans le visage, celle qu’on certaines personnes, comme les violeurs ou les tueurs, celle qui te dit : « c’est la fin ». Pour ma part, ils m’ont attaché des pinces métalliques autour des chevilles et des fils sous les ongles, ils m’ont ensuite aspergé d’eau et ont commencé l’électrocution. Les militaires me demandaient sans cesse « Qui sont tes complices ? Qui sont les autres gays avec qui tu baises ? Dis-le nous, sinon on te tue ! ». Ne t’inquiète pas je n’ai jamais dit quoique ce soit, je suis toujours resté muet comme une tombe. J’ai enduré les pires souffrances, les pires humiliations.
Dès fois, ils nous obligeaient à nous mettre en rangs et à nous attribuer des prénoms féminins. C’était dégradant. Lorsque nous étions dans nos cellules, nous ne pouvions ni dormir, ni manger, ni bouger car elles étaient beaucoup trop petites et nous étions trop nombreux. Pour nous rabaisser encore plus, ils nous jetaient les restes de leurs repas. Ne crois pas que c’était pour nous nourrir. C’était pour nous obliger à nous entretuer pour de la nourriture.
Tous les mardis, enfin je crois, les gardiens nous battaient avec des tuyaux, des barbelés, enfin tous ce qu’ils leurs passaient sous la main.
Le pire dans toute cette purge, c’était les exécutions. Ils embarquaient ceux qui avaient parlé. Ils traînaient ceux que l’on pouvait considérer comme les plus lâches, dans une pièce au fond du couloir. On les regardait partir en savant pertinemment que l’on ne les reverrait plus jamais. Le d’étonnement de la balle résonnait dans toute la prison. Pour finir, les assassins écrivaient les noms des cadavres, sur les murs avec leur propre sang.
Et encore cet acte, était réservé aux plus lâches. Dans le cas contraire, les gardiens appelaient leurs familles et leurs demandaient de les tuer eux-mêmes.
Voici la description de toute l’horreur que j’ai subi pendant 1 mois. Un mois de souffrances, autant physique que psychologique.
Je me demande si un jour je pourrais être heureux. Je commence une nouvelle vie en France, loin des atrocités russes. Grâce à l’association LGBT, j’ai un toit sur la tête. Sans eux, je serais sûrement dans la rue. Ils m’aident tous les jours avec des cours de français, ils m’aident aussi dans la construction de mon dossier en vue d’avoir des papiers pour rester ici. Lorsque je sors, j’ai toujours cette boule au ventre. J’ai peur, à l’idée qu’un jour les policiers tchétchènes ne remontent jusqu’à moi. Tous les soirs, m’endormir est un vrai cauchemar. Je me remonte toute les atrocités qu’ils m’ont fait subir, je pense aussi aux papiers, si j’en aurais ou pas.
Depuis l’Antiquité, les homosexuels sont persécutés. La société française rejette les gays. Par exemple, pendant la 4ème République (1946 – 1958) l’homosexualité était qualifiée de « fléau social ». En 1968, la France décide de classer l’homosexualité comme une maladie mentale. Celle-ci sera retirée en 1981.
Grâce au PACS, les homosexuels agrandissent leurs droits en matière de vie de couple, mais aussi fiscaux et de succession. Depuis le 13 avril 2013, le mariage pour tous est légalisé en France. La France est le 14e pays du monde à le légaliser. Avec cette loi, les gays peuvent désormais se marier et bénéficier des mêmes droits que les hétérosexuels : l’adoption et la succession. Mais cette loi entraîne aussi une forte hausse des agressions homophobes et des manifestations anti mariage pour tous. Je pense que nous devrions tous bénéficier des mêmes droits, que l’on soit gays ou non. Tu es jugé, persécuté parce que tu aimes une personne de même sexe que toi. Tu as des droits différents à ceux des hétérosexuels, parce que tu aimes un homme.
Alors que la France vient tout juste d’autoriser le mariage pour tous, la Russie, envisage de voter pour une loi homophobe. Nous sommes le 26 avril 2013, et l’association ARTKARA, réunissant des artistes russes à Paris, mais aussi, la fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), Inter-LGBT et l’association « Russie-Libertés », décide de créer une exposition militante nommée « L’AMOUR DANS TOUS SES ÉTATS ». Vous vous rendez compte qu’une catégorie de personnes est touchée par des lois totalement liberticides ! Ces lois empêchent la diversité et l’acceptation de personnes différentes dans un pays, des personnes non pas le droit de s’exprimer à cause de leur orientation sexuelle. Ces expositions aident à sensibiliser la population sur ceux que peuvent endurer les homosexuels au quotidien.
Nous pouvons citer plusieurs écrivains ayant lutté pour un seul et même but : l’homophobie. James Baldwin, est un auteur américain né en 1924 et décédé en 1987. Il a écrit des essais pour explorer les non-dits et les tensions sous-jacentes autour des distinctions raciales, sexuelles et de classe au sein des sociétés occidentales, en particulier en Amérique au milieu du XXe siècle. Ses romans et ses pièces de théâtre transposent quant à eux vers la fiction des dilemmes personnels, questionnant les pressions sociales et psychologiques complexes qui entravent non seulement l’intégration des personnes noires, mais aussi des hommes gays ou bisexuels. Mariela Castro, est la fille de Raul Castro, frère de Fidel Castro. Elle a participé aux campagnes pour le droits LGBT. En 2008, elle permet aux Cubains d’avoir le droit de changer de sexe dans leur pays sans ne payer aucune charge. Elle milite également pour le mariage homosexuel. Alice Nkom, est une avocate camerounaise qui crée en 2003 l’Association de défense des homosexuels du Cameroun. Elle défend en 2005, onze jeunes homosexuels emprisonnés et en 2013, obtient le premier acquittement de deux jeunes homosexuels dans un pays où la pénalisation de l’homosexualité existe depuis 1972. Christiane Taubira est une femme politique française ayant marqué l’histoire. En tant que garde des Sceaux, elle porte le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes du même sexe, qu’elle qualifie de « réforme de civilisation ». Lors des débats au Parlement, où elle est particulièrement présente, ses nombreuses prises de parole et son habileté suscitent le respect, plus que l’approbation, de l’opposition, qui avait pourtant fait d’elle une cible privilégiée lors de ses débuts au gouvernement, faisant de ce débat un « moment » particulier de sa carrière politique. Heureusement que ces personnes sont là pour défendre les droits des homosexuels, écrire des choses pour que cela ait un impact dans la vie des gens.
Je me rends compte que nous ne sommes pas tout seuls, que ce n’est pas notre faute d’être homosexuels, que ce n’est pas une maladie. Il faut dire que les hétérosexuels se discriminent entre eux, soit elle n’est pas parfaite, soit il est trop gros… J’en pense qu’il faudrait se préoccuper aussi bien de nous que d’eux. Chacun est comme il est, tous le monde est différent et personne n’est parfait. Je finirai sur ce proverbe Africain qui j’espère vous fera cogiter : « Le dialogue véritable suppose la reconnaissance de l’autre à la fois dans son identité et dans son altérité ». Pensez-y et dites- vous qu’il faut de tout pour faire un monde.
Andrew
Enora T., 1L1